Pouvez-vous nous dire quelques mots sur votre parcours et vos éventuelles spécialisations ?
Après 30 ans passés à Paris, je suis désormais basé dans la région Grand Est (Aube) depuis une dizaine d’années et continue à intervenir dans toute la France selon les projets. Je me suis rapidement orienté vers la maîtrise d’ouvrage privé. Mes clients sont donc principalement des chefs d’entreprise qui ont une approche des choses très rationnelle.
Connaissiez-vous les spécificités de la construction industrialisée avant de travailler avec Cougnaud Construction ?
Pas vraiment. J’ai longtemps fait appel à la construction traditionnelle qui est plutôt dans la pratique usuelle des architectes et répond également à la demande des maîtres d’ouvrage, même si les mentalités évoluent significativement depuis quelques années.
À quelle occasion avez-vous découvert ce mode de construction ?
C’était il y a 5 ans. Un maître d’ouvrage m’a fait part de son intérêt pour ce type de procédé, notamment en raison de délais serrés. Nous avons donc réalisé ensemble une analyse rationnelle de ce que pouvait apporter la construction industrialisée sur ce projet. Cette étude s’est révélée concluante puisqu’elle a débouché sur une collaboration avec Cougnaud Construction.
Quels en sont les principaux avantages selon vous ?
La réalisation très maîtrisée en fabrication supprime les aléas de chantier (intempéries, problèmes de coordination, d’indisponibilité de certains corps d’état…) et garantit une vraie qualité de finition. De plus, la construction industrialisée requiert une synthèse très précise des éléments techniques en amont de la phase de construction. C’est une excellente chose car on acquiert une parfaite connaissance du projet avant sa réalisation sur chantier. Dans un contexte de multiplication des contraintes normatives, juridiques et réglementaires, cela limite considérablement les nombreuses erreurs possibles et retards qui peuvent en découler.
Etant donné les prix élevés du foncier comme des loyers, une livraison rapide dans les temps impartis constitue-t-elle un atout de poids pour vos clients ?
La tenue des délais est en effet un critère essentiel pour un chef d’entreprise. Imaginez la désorganisation et le manque à gagner engendrés par un retard de livraison ! Mes clients veulent être certains de pouvoir emménager à la date prévue afin de libérer sans surcoût (double loyer, pénalités de retard) leurs anciens bureaux, de mutualiser deux sites distincts sur un seul espace, d’engager des collaborateurs pour conquérir de nouveaux marchés… Cet impératif d’optimisation de la rentabilité s’applique bien entendu aux autres secteurs, à l’image de celui du logement : plus le délai de chantier est court, plus on commercialise rapidement le programme.
Aviez-vous certains préjugés vis-à-vis de ce procédé constructif ?
On a toujours une certaine appréhension vis-à-vis d’un système qu’on ne connaît pas et quelques réserves à lever, comme le fait d’être possiblement bridé par une conception modulaire. Dans le domaine du bâtiment tertiaire, on travaille généralement de manière tramée donc ça n’était pas un problème pour moi. En tout état de cause, Cougnaud permet d’adapter la dimension des éléments modulaires aux besoins de la réalisation donc cette crainte n’a pas lieu d’être en réalité. Par ailleurs, je n’ai jamais douté de la qualité finale de l’ouvrage car elle dépend avant tout des matériaux utilisés. Sur ce point, la construction industrialisée offre une grande liberté, dans le choix comme dans la mixité. L’alliance de l’acier, du bois et du béton garantit notamment d’excellentes performances thermiques, acoustiques… mais aussi un vrai confort de vie pour les utilisateurs.
Avez-vous échangé avec les architectes du bureau d’études Cougnaud ?
Tout à fait, c’est une nécessité positive. Elle évite d’avoir à reprendre des plans parce qu’on n’a pas intégré dès le départ certaines données spécifiques à la construction modulaire. Pour le CNPE* de Gravelines (2 600 m2) par exemple, nous avons échangé dès les premières esquisses du projet qui exprimaient les contraintes du maître d’ouvrage (bureaux, circulation, sécurité…). Ce travail collaboratif en amont, qui associe également techniciens et ingénieurs à la réflexion, permet d’aboutir à la synthèse et la traduction architecturale du projet.
* Centre Nucléaire de Production d’Électricité
Quels sont les facteurs clefs de succès pour une réalisation de cette taille ?
Tout se joue au début du projet. Il faut dès le départ instaurer une méthode de travail rigoureuse et collaborative qui mette en relation architectes, ingénieurs, techniciens… pour aboutir à une bonne définition du programme (le maître d’ouvrage n’en a souvent pas à ce stade). Cela pose des bases claires afin d’organiser efficacement le projet et le mener sans accroc par la suite.
En parlant de travail collaboratif, que pensez-vous du BIM (Building Information Management) ?
La démarche est assez nouvelle mais me paraît absolument nécessaire en raison de la complexification technique et réglementaire du secteur de la construction. Cet outil technologique peut aider à réaliser correctement la synthèse du projet : surface, confort, équipement, fonctionnement de l’entreprise, type d’usagers… Elle doit aussi permettre aux architectes de retrouver leur fonction de chef d’orchestre dans une opération immobilière.
Vous venez d’évoquer le confort, le fonctionnement de l’entreprise… et donc la maîtrise d’usage d’un bâtiment. Cet aspect revêt-il une importance croissante selon vous ?
La notion « d’usage » intéresse de plus en plus, c’est indéniable. En particulier les grandes entreprises qui portent une attention grandissante au bien-être de leurs salariés. Selon la culture de l’entreprise, les attentes du personnel sont transmises par son dirigeant ou un représentant du personnel qui prend part aux discussions dès le lancement du projet. La mission intrinsèque d’un architecte est la conception et l’intégration d’un bâtiment dans son environnement mais les règlements d’urbanisme sont également rédigés en ce sens. Les nouveaux programmes doivent en effet s’inscrire dans une réalité environnementale, paysagère et de quartier, afin de satisfaire pleinement les attentes des usagers.
Interview extrait de C_La Revue#3 “La maîtrise d’usage : quand l’utilisateur prend part au processus de création“