En tant qu’architecte, gérant de l’agence Moonarchitectures, quelles sont les raisons qui vous poussent à conduire des projets en construction hors-site ?
Elles sont multiples. Si l’on compare la construction hors-site à la construction conventionnelle, les avantages les plus évidents sont à rechercher du côté de la vitesse d’exécution, de la précision du travail industriel ou encore de la qualité de construction. Sur le chantier, les incidences sont très positives grâce à la réduction des nuisances et l’optimisation du travail pour les personnes qui interviennent sur le site. Par ailleurs, la construction hors-site permet surtout de réaliser des bâtiments évolutifs, capables de répondre aux défis contemporains.
Projet du Grand Paris, Jeux Olympiques 2024… : est-ce à ce genre de défis que la construction hors-site apporte des solutions pertinentes ?
Bien sûr. Non seulement, elle permet d’y répondre vite mais, en outre, le caractère évolutif des bâtiments construits est une réelle opportunité. Pour reprendre l’expression du sociologue Zygmunt Bauman, nous évoluons dans une « société liquide ». Que l’on se place à l’échelle politique ou bien à celle de l’individu, les espaces évoluent et se recomposent en permanence. Aujourd’hui, il est très difficile de savoir ce qu’un bâtiment sera dans 5 ou 10 ans. L’une des réponses de la construction hors-site est de pouvoir s’adapter à ce futur inconnu.
Justement, comment s’adapte-t-elle ?
Un hôtel deviendra demain une résidence étudiante. Des bureaux seront transformés en centre d’accueil… Au fil de leur évolution, les bâtiments modulaires peuvent être agrandis ou réduits. La construction hors-site permet donc la réalisation de structures qui auront plusieurs vies ou plusieurs usages. Elle s’inscrit alors dans cette idée contemporaine de réemploi ce qui la rend notamment plus efficiente au niveau écologique.
Revenons sur les projets du Grand Paris ou des JO 2024 : les collectivités vont-elles préconiser la construction hors-site ?
À l’étranger, comme à New York ou à Singapour, les politiques ont largement recours à la construction hors-site. En France, la prise de conscience est en marche mais je crois qu’un travail de pédagogie reste encore à faire pour promouvoir ce système constructif. Si nous prenons l’exemple des JO 2024, le challenge est considérable. Il s’agit de livrer dans un calendrier serré les 17 000 logements temporaires, prévus par le village olympique. Pour la réalisation de ce projet, la construction hors-site me paraît particulièrement appropriée.
Pensez-vous que la construction hors-site soit un moyen de résoudre les problèmes liés à la pression foncière au sein des métropoles françaises ?
Oui et Moonarchitectures en a fait l’expérience avec l’association Aurore. À Paris, pour résoudre des situations problématiques liées à l’accueil d’urgence, nous nous sommes posés la question du terrain. Où le trouver ? Nous avons alors décidé de travailler sur le foncier intercalaire. De la même manière que les bâtiments publics sont mis à disposition des associations, nous avons demandé à la collectivité de mettre son foncier à disposition. Un bâtiment provisoire y est construit pour une durée déterminée. À l’issue du bail, il est désinstallé et le terrain est récupéré.
Concernant l’expérience utilisateur, la construction hors-site offre-t-elle les mêmes performances et le même confort que la construction conventionnelle ?
Sur les plans thermique et acoustique, les performances sont optimales. Conventionnelle ou hors-site, à mon sens, les usagers ne se rendent pas compte de la différence entre les deux modes de construction. Tout se joue dans la qualité des finitions.
Entretien extrait de C_La Revue#5
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